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Stéphane Nave

Peut-on déshériter un de ses enfants ?


La France est le pays de la « réserve », si bien que l’envie de déshériter ses enfants est un principe inconcevable. Le Code Civil prévoit qu’une part des biens, la « réserve héréditaire », leur est toujours due. Toujours ? Il existe tout de même certaines dispositions permettant de favoriser des héritiers plus qu’un autre.


Utiliser le mécanisme de la quotité disponible pour procéder à un partage inégalitaire


La quotité disponible est la part qui peut librement être attribuée à un héritier ou un tiers. Par exemple, en présence de trois enfants ou plus, ils auront des droits incompressibles sur ¾ de la succession (leur réserve héréditaire), le quart restant constituant la quotité disponible qui peut librement être léguée.


La première façon d’avantager un ou plusieurs enfants au détriment d’un autre consiste à leur léguer par testament l’intégralité de la quotité disponible. Exemple : Monsieur décède en laissant un actif successoral de 400 000 € à ses 3 enfants. Il lègue la quotité disponible à deux de ses trois enfants.



L’assurance-vie hors succession pour transmettre des capitaux hors part successorale.


L’assurance-vie reste le moyen le plus simple de favoriser un enfant. La clause bénéficiaire stipulera que le capital reviendra à l’enfant que vous souhaitez privilégiez. Au décès du souscripteur, les sommes investies reviendront aux bénéficiaires désignés sans être pris en compte pour déterminer l’actif successoral et la réserve héréditaire. Le risque ? Un héritier qui s’estime lésé doit prouver que les primes sont « manifestement exagérées » par rapport aux revenus, au patrimoine du souscripteur et à son espérance de vie. Exemple en combinant le mécanisme de la quotité disponible et de l’assurance-vie :


Madame décède en laissant 3 enfants dont 1 qu’elle souhaite moins favoriser que les autres.



Anticiper l’éviction grâce à la renonciation à l’action en réduction


Le pacte successoral permet au donataire de favoriser un héritier réservataire au profit d'un autre, un de ses enfants par rapport aux autres. Parallèlement, le ou les héritiers réservataires qui ne bénéficient pas de cet avantage doivent expressément renoncer dans l'acte à une action en réduction. Les enfants peuvent être d’accord pour être partiellement déshérités, par exemple pour favoriser un cohéritier qui s’est occupé de ses parents, ou pour aider un frère ou une sœur handicapé(e). Ce mécanisme est rendu possible par la renonciation à l'action en réduction qui permet à un héritier de renoncer à son droit d'agir à l'encontre d'un autre héritier dont la part empièterait sur sa réserve. Par cet acte, l'héritier consent donc à renoncer à une partie ou à la totalité de ses droits au profit d'un ou plusieurs bénéficiaire(s) désigné(s).


La vente d’un bien en viager au prix du marché pour réduire la masse à partager


Afin de sortir un actif immobilier d’un patrimoine, la vente du bien en viager à ses enfants pourra être utilisée. Il conviendra que le prix de la rente et du bouquet soit réel et corresponde bien au prix du marché pour empêcher l’héritier lésé de tout recours. Cela évitera aussi le risque de requalification par l’administration fiscale en donation déguisée ou indirecte. Au décès, l’acheteur récupérera la pleine propriété d’un bien immobilier, qui ne rentrera plus en succession.


L'enfant indigne n'a pas le droit à la qualité d'héritier


Le comportement indigne est une exception au principe de la réserve héréditaire et répond donc à des exigences particulières. Si l’héritier est reconnu indigne à succéder, il n’aura plus aucun droit dans la succession. On dit qu’il est déchu du droit à hériter. Un enfant indigne est un enfant qui est condamné à une peine criminelle ou correctionnelle ayant un rapport avec le décès de ses parents. Il faut qu’une déclaration d’indignité soit prononcée pour que cet héritier ne bénéficie pas du patrimoine successoral. Il ne sera donc pas concerné par la succession.


Éviter la réglementation française grâce à l’expatriation fiscale


L’objectif est simple : déménager dans un pays où la réserve n’existe pas, par exemple en Grande-Bretagne ou dans la plupart des pays anglo-saxons. C’est radical, mais très efficace. Vous n’êtes plus soumis aux respects des réserves héréditaires. De ce fait, vous réalisez comme bon vous semble le partage de votre patrimoine sans aucune contrainte.


Vous l’aurez compris, il est impossible de priver un héritier de sa réserve héréditaire sauf si celui-ci veut votre mort ou concède à sa réserve. Hors cas extrême, et lorsque la situation familiale vous contraint à ne pas respecter le partage égalitaire de votre succession, vous avez à votre disposition certaines possibilités pour contourner la règle de la réserve héréditaire bien que vous ne puissiez jamais le déshériter totalement.



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