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Stéphane Nave

Détenir sa résidence principale dans une société (SCI) : bonne ou mauvaise idée ?

L'acquisition d'une résidence principale est une étape cruciale dans la vie, souvent associée à des considérations financières et patrimoniales importantes. Parmi les options qui s'offrent aux propriétaires, la détention de sa résidence principale au sein d'une Société Civile Immobilière (SCI) suscite de nombreuses interrogations. Est-ce une stratégie judicieuse ou une démarche à éviter ? Pour répondre à cette question complexe, il est essentiel d'explorer les avantages et les inconvénients de cette approche, tout en tenant compte des implications juridiques, fiscales et financières qui en découlent.


Cette option présente des avantages


Fixer les propres règles de la Société Civile  

La SCI évite l’indivision et ses règles contraignantes, notamment l’unanimité pour les décisions importantes. La rédaction des statuts permet en effet de fixer ses propres règles de fonctionnement, de désigner les gérants et leurs pouvoirs plus ou moins étendus.  Les statuts fixent également les règles liées au vote (quelle majorité : unanimité, majorité des 2/3, quel droit de vote pour quelle part sociale).  


Réduire les coûts de transmission 

Si la société s’est endettée pour acheter les biens, le passif vient diminuer l’actif et donc la valeur des parts transmises. 

Une éventuelle décote sur la valeur des titres de société est admise au titre de l’illiquidité des parts. (10% environ)  

La transmission de parts sociales peut se faire de manière progressive pour profiter des abattements tous les 15 ans.  


Anticiper la transmission 

La transmission peut se faire en démembrement, ce qui permet de conserver les éventuels revenus et le contrôle de la société selon l’aménagement des statuts. 

Les statuts peuvent prévoir une gérance successive, c’est-à-dire de nommer par avance le futur gérant qui prendra la place du gérant actuel lors de son décès, afin d’organiser la gestion future du patrimoine.   


Mais également des inconvénients

La détention de la résidence principale au travers d’une société (SCI, SARL etc.) peut faire perdre au propriétaire certains avantages civils et fiscaux dont il bénéficierait en cas de détention en direct et notamment : 

La protection du "logement familial" : 

La détention de la résidence principale au sein d’une société peut faire perdre au conjoint non associé le bénéfice de la protection sur le logement familial, contrairement à ce qui est prévu en cas de détention en direct par l’un ou l’autre des époux.  


Le bénéfice du droit viager et temporaire au logement : 

La détention en société de la résidence principale, prive le conjoint survivant du bénéfice du droit de jouissance temporaire sur le logement (et son mobilier) et du droit viager d’usage et d’habitation, dont il aurait pu bénéficier si le bien avait été détenu en direct, même uniquement par son époux. 


L’abattement de 20 % au titre des droits de succession : 

La résidence principale du défunt, détenue par une société (SCI, SARL), ne bénéficie pas de l’abattement de 20 % prévue en matière de droit de succession, lorsque la résidence principale est occupée à la date du décès, à titre de résidence principale, par le conjoint, le partenaire de PACS, un enfant mineur ou majeur protégé. 


L’abattement de 30 % au titre de l’Impôt sur la fortune immobilière (IFI) : 

La résidence principale du contribuable, détenue par une société, ne bénéficie pas de l’abattement de 30 % pour la valorisation à l’IFI. 


L’exonération des plus-values de cession : 

Lorsque la résidence principale est détenue par une société soumise à l’impôt sur les revenus et qu’il y a une mise à disposition à titre onéreux à l’égard d’un des associés qui en fait sa résidence principale, l'exonération des plus-values immobilières pour vente de la résidence principale ne s’applique pas. 


Le déblocage de certains produits d’épargne : 

L’acquisition de la résidence principale par le biais d’une société ne permet pas d'obtenir :   

  • le déblocage anticipé des sommes détenues au sein d’un PERCO et d’un PEE (ou d’un PEI) ; 

  • à notre sens, le déblocage anticipé des sommes détenues au sein d’un PER ; 

  • à notre sens, la sortie en capital du PERP ; 

  • un prêt épargne logement. En effet, ils ne sont accordés qu’a des personnes physiques et ne peuvent être affectés au financement de logements détenus par des sociétés (sauf résidence principale située dans un immeuble collectif détenu par une SCI d’attribution). 


L’insaisissabilité de la résidence principale de l’entrepreneur individuel : 

Pour les créances nées avant le 15 mai 2022, l'entrepreneur individuel ne bénéficie pas du dispositif d'insaisissabilité lorsque sa résidence principale de l'entrepreneur est détenue au travers d'une société. Pour les créances nées après le 15 mai 2022, la résidence principale, même détenue à travers une société est insaisissable pour les créanciers. Toutefois, des difficultés risquent d'apparaître pour les sociétés civiles qui détiennent à la fois des biens immobiliers personnels et les locaux professionnels. 


Le bénéfice de MaPrimeRénov' : 

Les sociétés (SCI, SARL de famille, etc.) ne sont pas éligibles à MaPrimeRénov'. Ainsi, la société (à l'IR ou l'IS) qui réalise des travaux de rénovation énergique ne peut pas prétendre à cette aide. 


La mise en location de la résidence principale par l’associé ou la société :  

L’associé bénéficie d’une occupation à titre gratuit (mise à disposition du bien) par la société. Il ne peut pas, sauf à ce que la société l’y autorise expressément, sous-louer le bien. 


En cas de location nue par la société (peu probable en pratique, car il s’agit de la résidence principale de l’associé), la durée minimum du bail est alors de 6 ans avec reconduction tacite, et non plus de 3 ans comme pour un bailleur personne physique (ou une société civile familiale - constituée exclusivement entre parents et alliés jusqu’au 4ème degré inclus). 

De plus, les sanctions en cas de non-respect, par la société, de ses obligations (congé frauduleux, demande de documents interdits) peuvent être 15 000 € voir 30 000 € dans certains cas, contre 3 000 € à 6 000 € pour un bailleur personne physique. 


Dans le cadre de location meublée :  

  • Si la résidence principale est détenue par une SCI à l'IR : en principe, une société civile qui réalise une activité de location meublée est obligatoirement assujettie à l’IS.  

  • Si la résidence principale est détenue par une SARL de famille : l'option pour le régime de la SARL de famille (imposition à l'IR) suppose que la société exerce exclusivement une activité commerciale. Or, si la société met à disposition la résidence principale à titre gratuit, elle n'exerce plus une activité exclusivement commerciale : la SARL passe obligatoirement à l'IS. 


Le statut d’activité opérationnelle au sein de la société : 

Lorsque la société détient des biens de jouissance (notamment la résidence principale) et des biens professionnels, elle peut dans certains cas perdre le bénéfice de dispositifs fiscaux qui nécessitent :  

  • une activité opérationnelle prépondérante (dispositif Dutreil, biens professionnels, et plus généralement le statut de holding animatrice dans ces deux dispositifs) ; 

  • une activité opérationnelle exclusive (SARL de famille). 


Cependant, chaque projet d’investissement et stratégie patrimoniale résultent d’objectifs propres à une situation. Certains montages, comme l’investissement de sa résidence principale dans une SCI, s’appliquent difficilement dans une stratégie patrimoniale. Toutefois, si vous êtes dotées d’un profil qui s’y prête, cet investissement est susceptible de répondre à vos objectifs. Notre cabinet se tient à l’écoute pour répondre à l’ensemble de vos interrogations et vous apporter un accompagnement personnalisé.

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